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Le Blog de Jonathan Fanara

Le Blog de Jonathan Fanara


Le Plus : "Sang pour sang" / Le Moins : "Last Days" (#19)

Publié par Jonathan Fanara sur 30 Juin 2013, 08:33am

Catégories : #Cinéma

Le Plus/Le Moins est une chronique cinématographique hebdomadaire. Vous y découvrirez, toujours avec concision, le meilleur et le pire de mes (re)découvertes.

 

 

Et cette semaine…

 

Le Plus : Sang pour sang (1984). S’il fallait cartographier le septième art, nul doute que les frères Coen seraient à la fois une montagne d’humour noir (Fargo, The Big Lebowski) et un océan de violence (No Country for Old Men, Miller’s Crossing). C’est en effet peu dire que les deux virtuoses occupent une place à part dans le microcosme cinématographique. Avec un sens inné de la prise de vues doublé d’une plume exquise, les prolifiques Joel et Ethan agissent de concert, depuis 1984, pour crever l’écran. Et c’est chose faite dès leur premier essai, Sang pour sang, qui a déjà tout du coup de maître. Les deux frangins y laissent transparaître leur patte si singulière et mettent en scène – une habitude de la maison – des personnages hautement improbables, au bord de l’implosion et sournois à souhait. La vision noire et joyeusement perverse des Coen y transpire à chaque plan, alors même que les thématiques de la vilenie et de la trahison guident avec autorité leur propos ensauvagé. Au menu : l’époux cocufié et vengeur, la femme fatale, l’amant qui n’a pas froid aux yeux et le tueur à gages peu scrupuleux. Tous vont voir une spirale infernale entraver leurs plans les plus fous. Jeu de pistes aux allures de thriller policier, Sang pour sang se place volontiers sous la tutelle d’une ironie débridée et d’un chassé-croisé de malentendus. Côté technique, les deux orpailleurs valent bien leur pesant d’or. Ils filment au scalpel, magnifient la réalisation, multiplient les plans-séquences déroutants et arborent une maîtrise formelle de tous les instants. À mille lieues des brèves de comptoir, le scénar sous-tend quant à lui une densité remarquable et se trouve porté par une narration implacable et des dialogues de derrière les fagots. Film typiquement coenien, donc crasseux et à double visage, Sang pour sang met en saillie ces intentions inavouables qui d’abord s’entrecroisent, puis s’entrechoquent et, enfin, s’entretuent. Le tout avec un petit extra à la clé : la scène finale, sommet d’ironie s’il en est, condense avant l’heure toute la mythologie des frères Coen. Rien que pour cela, ce trésor enfoui vaut la peine d’être (re)vu. (9/10)

​​ 

Le Moins : Last Days (2005). Et si Last Days était en quelque sorte l’anti-Harvey Milk, l’anti-Will Hunting ?  Gus Van Sant y cuisine la déchéance à toutes les sauces, s’inspirant librement à cet effet des derniers jours de Kurt Cobain, monstre sacré de la culture rock américaine. Expérimental, taciturne, déconstruit et inamovible, ce long métrage déprimé braque son regard sur la perte de repères, ne tempérant jamais le pessimisme ambiant et filmant l’ennui comme pour mieux clore une trilogie consacrée à l’errance juvénile. Mais cette contemplation hypertrophiée de la perdition ne fait finalement que jeter le doute : pourquoi un long métrage là où une photographie aurait amplement suffi ?  Car Last Days repose exclusivement sur des dispositifs formels et néglige tant le rythme que la parole. Il ne doit son salut qu’à la performance de Michael Pitt, complètement déshumanisé pour la cause, crevant l’écran et saisissant à bras-le-corps un rôle de composition casse-gueule. Pour le reste, Gus Van Sant perd pied et sombre dans une réalisation ankylosée, comme dépassé par le propos qu’il entend défendre. Cela sans compter que le scénario tient dans un mouchoir de poche et que le second degré n’a manifestement pas voix au chapitre. On reste au mieux à des kilomètres d’Elephant, le morceau de bravoure de cette trilogie sur la jeunesse, qui présente une tout autre envergure. Au final, Last Days ne peut que plaider coupable : non seulement il se révèle indigne de son maître d’œuvre, mais il se dévoie en plus du début à la fin. En trois mots : laborieux, thrombosé, inutile. (5/10)

 

 

Lire aussi :

Le Plus : "Frenzy" / Le Moins : "L’Ombre d’un soupçon" (#18)

Le Plus : "Les Promesses de l’ombre" / Le Moins : "Very Bad Trip 3" (#17)

Le Plus : "eXistenZ" / Le Moins : "Des hommes d’influence" (#16)

Le Plus/Le Moins est une chronique cinématographique hebdomadaire. Vous y découvrirez, toujours avec concision, le meilleur et le pire de mes (re)découvertes.

 

 

Et cette semaine…

 

Le Plus : Sang pour sang (1984). S’il fallait cartographier le septième art, nul doute que les frères Coen seraient à la fois une montagne d’humour noir (Fargo, The Big Lebowski) et un océan de violence (No Country for Old Men, Miller’s Crossing). C’est en effet peu dire que les deux virtuoses occupent une place à part dans le microcosme cinématographique. Avec un sens inné de la prise de vues doublé d’une plume exquise, les prolifiques Joel et Ethan agissent de concert, depuis 1984, pour crever l’écran. Et c’est chose faite dès leur premier essai, Sang pour sang, qui a déjà tout du coup de maître. Les deux frangins y laissent transparaître leur patte si singulière et mettent en scène – une habitude de la maison – des personnages hautement improbables, au bord de l’implosion et sournois à souhait. La vision noire et joyeusement perverse des Coen y transpire à chaque plan, alors même que les thématiques de la vilenie et de la trahison guident avec autorité leur propos ensauvagé. Au menu : l’époux cocufié et vengeur, la femme fatale, l’amant qui n’a pas froid aux yeux et le tueur à gages peu scrupuleux. Tous vont voir une spirale infernale entraver leurs plans les plus fous. Jeu de pistes aux allures de thriller policier, Sang pour sang se place volontiers sous la tutelle d’une ironie débridée et d’un chassé-croisé de malentendus. Côté technique, les deux orpailleurs valent bien leur pesant d’or. Ils filment au scalpel, magnifient la réalisation, multiplient les plans-séquences déroutants et arborent une maîtrise formelle de tous les instants. À mille lieues des brèves de comptoir, le scénar sous-tend quant à lui une densité remarquable et se trouve porté par une narration implacable et des dialogues de derrière les fagots. Film typiquement coenien, donc crasseux et à double visage, Sang pour sang met en saillie ces intentions inavouables qui d’abord s’entrecroisent, puis s’entrechoquent et, enfin, s’entretuent. Le tout avec un petit extra à la clé : la scène finale, sommet d’ironie s’il en est, condense avant l’heure toute la mythologie des frères Coen. Rien que pour cela, ce trésor enfoui vaut la peine d’être (re)vu. (9/10)

 

Le Moins : Last Days (2005). Et si Last Days était en quelque sorte l’anti-Harvey Milk, l’anti-Will Hunting ?  Gus Van Sant y cuisine la déchéance à toutes les sauces, s’inspirant librement à cet effet des derniers jours de Kurt Cobain, monstre sacré de la culture rock américaine. Expérimental, taciturne, déconstruit et inamovible, ce long métrage déprimé braque son regard sur la perte de repères, ne tempérant jamais le pessimisme ambiant et filmant l’ennui comme pour mieux clore une trilogie consacrée à l’errance juvénile. Mais cette contemplation hypertrophiée de la perdition ne fait finalement que jeter le doute : pourquoi un long métrage là où une photographie aurait amplement suffi ?  Car Last Days repose exclusivement sur des dispositifs formels et néglige tant le rythme que la parole. Il ne doit son salut qu’à la performance de Michael Pitt, complètement déshumanisé pour la cause, crevant l’écran et saisissant à bras-le-corps un rôle de composition casse-gueule. Pour le reste, Gus Van Sant perd pied et sombre dans une réalisation ankylosée, comme dépassé par le propos qu’il entend défendre. Cela sans compter que le scénario tient dans un mouchoir de poche et que le second degré n’a manifestement pas voix au chapitre. On reste au mieux à des kilomètres d’Elephant, le morceau de bravoure de cette trilogie sur la jeunesse, qui présente une tout autre envergure. Au final, Last Days ne peut que plaider coupable : non seulement il se révèle indigne de son maître d’œuvre, mais il se dévoie en plus du début à la fin. En trois mots : laborieux, thrombosé, inutile. (5/10)

 

 

Lire aussi :

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Le Plus : "Les Promesses de l’ombre" / Le Moins : "Very Bad Trip 3" (#17)

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